Contre Dictionnaire Amoureux du Polar / Lettre M (Deuxième partie)

Mille sabords !

Ce post que vous allez lire est le 774e écrit depuis la création en avril 2016 de broblogblack. Bonne lecture.

Ce projet de « Contre dictionnaire amoureux du polar » (CDAP) est un projet à long terme, très long terme. Il se veut un hommage critique au Dictionnaire amoureux du polar (DAP) de Pierre Lemaitre (Plon), lauréat du trophée 813 Maurice Renault récompensant un ouvrage mettant en avant « le genre que nous aimons »*, « notre objet de passion »**. J’ai relevé le défi de bâtir un contre dictionnaire au sien, un codicille ou plutôt un complément, pas qu’une exégèse ni qu’une critique. Ni éloge, ni hagiographie, ni panégyrique, mais pas non plus de pamphlet, de satire, de diatribe. Juste une petite porte entrouverte par l’auteur dans laquelle je me suis engouffré : « Il y aura des oublis impardonnables, des injustices criantes, des jugements contestables, c’est inévitable : c’est un dictionnaire de ce que j’aime, et encore n’ai-je pas pu mettre tout ce que j’aime. » (introduction, page 11). J’ai donc relevé la gageure de combler, de réparer, de contester et, inévitablement, de construire le dictionnaire de ce que j’aime, et encore, sans pouvoir y mettre tout ce que j’aime et avec une difficulté supplémentaire, c’est de ne pas pouvoir (vouloir) revenir en arrière une fois la lettre publiée (pas de vision générale avant la fin). Ce sera le CDAP d’un critique mais aussi celui d’un éditeur (La Loupiote), auteur, directeur de festival (du polar à La Roche-sur-Yon – 85), rédacteur d’une revue (Caïn) et de tous ses souvenirs. Ce sera avant tout le CDAP d’un hannibal lecteur. Chaque lettre donnera lieu à deux parties : une critique des entrées de Pierre Lemaitre et un développement de celles qu’il aurait pu/dû y mettre. Voilà. L’hommage est sincère mais la langue n’est pas de bois. Le maître me pardonnera. FB

* JP Manchette ** JB Pouy

À qui avez-vous affaire ? bio-biblio-2022

tome 26

Si vous avez manqué le débutrendez-vous à la fin !*

* pour retrouver ce qui est déjà du passé : les 25 premiers tomes…

alheureusement, vous avez loupé le tome précédent. Ne paniquez pas. Je vous guide. Dans le tome précédent (le 25e) – vous voyez, c’est simple…. -, j’avais mis en avant quelques-uns des choix de Pierre Lemaitre : Ed McBain, Elsa Marpeau, Millénium et Maud Mayeras et j’avais relevé le défi, comme depuis 24 tomes, de combler les failles, contester les choix, d’affiner le Dictionnaire Amoureux du Polar (PLON) de Pierre Lemaitre, le maitre me le pardonnera, en incluant dans mon CDAP les notules suivantes : M le maudit (Lang) et La contribution de François Guérif (M de Losey), McDaniel (Tiffany) et un 5/5 avec Olivia Castillon, McGuffin, Maffieuses (Les) (Dietrich), Malaussène et Malet (Léo). Mais le M est pléthorique, ça se bouscule au portillon, poussez pas. Voici venu, non le temps béni des colonies mais le temps ténu des candidats qui aimeraient bien un peu la lumière pour vous montrer leur ombre…

SOMMAIRE

enu svp ? Le voilà : Manufacture de livres (La) avec un 5/5 de Jean-Hugues Oppel, Manzini (Antonio), Mariée de corail (La) (Bouchard), Masque (Le) (et la plume), Maugendre (Paul), Memento, Mes soixante huîtres (Pouy) et Mesplède (Claude) et La Contribution de Pascal Dessaint

Manufacture de livres (La)

anifestement, il est l’éditeur qui monte. Pierre Fourniaud a été élu éditeur de l’année en 2023. Fondée en 2009, La Manufacture de livres est une maison d’éditions indépendante qui publie environ un roman et une non fiction par mois. Aidé par une directrice de diffusion (depuis 4 ans) et une attachée de presse (depuis 2), il publie « des auteurs français contemporains. Héritiers du roman noir ou du roman social, parfois inspirés par le roman d’aventures ou la fiction américaine, ils incarnent une voix littéraire moderne et vivante (…), des témoins (…) qui éclairent notre réalité ».

Pierre Fourniaud

Des couvertures splendides qui se remarquent de loin, un éclectisme qui ne peut que surprendre (voir le 5/5 de Jean-Hugues Oppel), une qualité littéraire évidente, un souci du réel et une vision militante sont autant de raisons d’ouvrir un livre de La Manufacture*.

* Oui, quand on est un habitué et un fidèle, le premier entraînant le second, on dit La Manufacture (et peut-être La Manu quand on est dans le cercle intime, mais ça…).

Quand on envoie un manuscrit à La Manufacture, il faut s’armer de patience (Lionel Destrumeau, accepté en 2020 a dû prendre RV dans deux ans, aujourd’hui, il ne faut pas espérer être publié avant 2025 dixit un auteur maison, Jean-Hugues Oppel…). Est-ce la rançon du succès ? Sans doute mais c’est aussi l’assurance d’un éditeur qui avance à son rythme et ne se laisse rien dicter, ni son goût, ni son calendrier.

Sa ligne éditoriale ? À défaut d’être claire, elle est « cohérente » assure-t-il : « ce sont des livres bien écrits ». Livre Hebdo

Ouvrir aujourd’hui un livre de La Manufacure, c’est un peu comme ouvrir un Gallmeister*, c’est l’assurance de lire du premier choix, de l’assumé. On est rarement déçu. Voilà quelque livres qui font la qualité éditoriale d’une entreprise et le goût intéressant d’un homme.

* Ce ne sont pas les seules maisons, évidemment, à fournir de la qualité, mais c’est je crois, à l’échelle, la comparaison la plus évocatrice.

Né d’aucune femme de Franck Bouysse

Né d’aucune femme est le roman dans lequel « les ombres passent aux aveux« . Un homme raconte la vie d’une femme qui a préféré le silence des mots aux fracas des voix. Ceci est le conte de Rose, laissée pour compte par son père à un ogre, dans une prison manoir dans lequel elle va grandir en passant du statut de fille à mère sans transition par l’étape femme, dans la violence et la négation des rêves. Et pourtant, elle vole Rose, elle tombe amoureuse Rose, elle s’arrache à la vie Rose. Chorale de sentiments où chaque personnage prend la parole pour se justifier, ce livre est d’une poésie sensible dans laquelle la misère nous enveloppe de son manteau sans jamais nous réchauffer, nous laissant « retourner dans le tourbillon de la nuit pour ne plus jamais en sortir » parce que « toute [notre] vie, [nous avons] failli être un homme« . Rose, elle aurait aimé être une mère, une vraie, et ne plus avoir à supporter « le silence, un silence terrible, vide de bruit, vide de sommeil, vide de mon âme« . Alors, elle ne parle pas, elle écrit et c’est la mort qui va transmettre son message de vie.

Franck BouysseNé d’aucune femme, La Manufacture des livres (331 pages, 2019, 20,90€). Papier déjà publié ici. Livre acheté en librairie.

Terre promise de Marc Villard

Comme à son habitude, Marc Villard livre avec Terre promise le livre promis : une novella ni trop longue pour faire un roman ni trop courte pour faire une nouvelle ; juste la longueur qu’il faut. Brodant autour de ses espaces favoris, Paris, Barbès, avec sa faune perdue, jeunes immigré.e.s sans papier, sur des thèmes intemporels, la dope et la pauvreté, il tisse une histoire cousue du fil noir de la fatalité où le suspense s’est tiré ailleurs, au soleil sans doute, où la misère est plus supportable sûrement, et où chacun.e avance vers l’inéluctable. Jérémy a une mère, plus pour longtemps, n’a pas de papier mais vend des partitions inédites de Fela volées par sa mère. Estelle avait une famille mais elle est loin et elle tapine vers la gare. Pour se sortir de cette torpeur morose, le plan est simple : il suffit de faire la mule. C’est sans risque.

Marc Villard développe son empathie qui transpire à chaque ligne, d’où le jugement est absent, et délie cette histoire comme une fuite de Lockheed d’une voiture descendant une route de montagne. Le style est sobre direct éthéré. Les personnages sont ce qu’ils portent, ce qu’ils disent et ce qu’ils font. C’est amer mais ça coule, c’est collant sans être sirupeux, désespérant sans être misérabiliste. La preuve ? « Tout ceci n’a rien à voir avec l’émigration éperdue des Africains, la tectonique des plaques, l’appauvrissement de la couche d’ozone, les guerres de religions, les soubresauts du CAC 40, les porcs qu’on balance et le drone métal. Nous sommes revenus ici à la préhistoire des hommes où, pour survivre, il faut tuer. » (p.125)

Terre promise de Marc Villard, La Manufacture de livres (2019, 125 pages, 11€90). Livre acheté d’occasion.

Gueules d’ombre de Lionel Destremau

« … c’est comme ça que je suis mort. » (p.113, p.135, ) ou « c’est ainsi (…) que je suis mort. » (p.73)

Siriem Plant enquête sur un soldat plongé dans le coma, Carlus Turnay, en tentant de découvrir son identité à travers ses amis de régiment, ceux qui l’ont côtoyépendant cette guerre dont on ne sait qui elle opposa vraiment ni quand elle s’est déroulée. Elle ressemble à la Première Guerre mondiale par sa phase de guerre de position, ses tranchées mais aussi à la Deuxième par son défaitisme, son questionnement sur sa préparation ou encore à une plus récente par ses toponymes, ses noms aux consonnes doublées fleurant l’Europe centrale ou le proche orient. En fait, elle ressemble à toute guerre, c’est là, je crois, l’objectif de Lionel Derstremau. En refusant d’ancrer son récit dans un temps et un espace ; il l’universalise, il nous oblige à nous y intégrer, il créé presque un souvenir. Cette guerre, nous la vivons comme une leçon non apprise, un mystère dérisoire, une catastrophe imminente. Cette guerre elle nous remplit par le vide, elle nous décicatrise, elle viole et voile nos consciences et pourtant nous l’acceptons, elle est nôtre. Est-ce que parce que nous sommes à genoux ? ou parce que nous sommes aphones ?

Lionel Destremau livre là un roman unique qui, sans partir du passé, nous parle du présent et interroge notre futur. Il met en lumière l’absurdité de la vie au sens camusien. Il faut imaginer Carlus Turney heureux…

Lionel Destremau, Gueules d’ombre, La Manufacture de livres (2022, 424 pages, 20€90). Livre reçu en cadeau 813. Merci.

19500 dollars la tonne de Jean-Hugues Oppel

L’auteur perpétue ses fouilles, pépère, charentaises aux pieds mais piolet dans la main, sur les gisements de terres rares (après Vostock – Rivages – déjà), ces ressources méconnues mais essentielles à de nombreuses marchandises mondialisées, notamment les numériques, c’est vous dire si sans on ne ferait pas avec. Donc convoitées. Donc qui rapportent. Donc qui attisent. De nombreuses personnes. Oppel nous propose d’en suivre quatre dans ce roman à plusieurs voix. Tout d’abord Mister K, un mystérieux auteur d’une newsletter économico-financière à l’humour corrosif, Falcon un tueur, professionnel en fin de course, sprinteur de l’élimination, en attente d’une éventuelle médaille, une en or : la réinsertion peinarde, la retraite pantouflarde, la fin de vie au soleil, Lady-Lee qui possède un badge qui ouvre de nombreuses portes car le sigle CIA les ignore et Killer Bob est un « excellent trader, aux nerfs d’acier », « assis devant ses quatre écrans plats superposés deux par deux ». Évidemment.

On attend la rencontre mais aura-t-elle lieu ? Et qui va rencontrer qui ? Qui est Mister K ? Falcon va-t-il mener à bien sa dernière mission et ranger son matos professionnel dans un vieux coffre en rotin dans le grenier d’une cabane de pêche tropicale ? Lady-Lee a-t-elle vraiment toutes les cartes en mains ou n’est-elle pas dépassée par un vieux tour de magie ? Killer Bob va-t-il s’enrichir, s’appauvrir, tirer la leçon finale, ânonner l’amoral ou l’immoral ?

Oppel tisse avec délice, amusement et suspense la trame de ce thriller économique malin (dans tous les sens du terme). On apprend beaucoup car il sait se documenter le bougre mais peu aussi car on sait l’homme, quand il s’agit d’en avoir plus, toujours prêt aux basses soumissions et aux pires saloperies. On referme le livre en regrettant tout de même une chose et l’on peut en faire grief à l’auteur : pourquoi seulement 250 pages ? Hein ? Au fait, qu’est-ce qui coûte 19 500 dollars la tonne ? L’étain. Et à quoi ça sert l’étain à part partouzer avec le cuivre pour faire du bronze et des monnaies antiques, des candélabres et des poignées de tiroirs au XVIIème, des sculptures au XIXème ? Des soudures électroniques et informatiques. Ha… Comme dirait Jorion, le dernier qui s’en va étain la lumière*… Le premier d’une trilogie avec Total Labrador et Noir diamant.

* Jorion, Le Dernier qui s’en va éteint la lumière (Fayard)

Jean-Hugues Oppel, 19 500 dollars la tonne, La manufacture du livre (2017, 250 pages, 16€90). Papier paru en 2018, . Nouvelle couverture en illustration. Livre reçu en service de presse ; merci à Jean-Hugues et à Pierre Fourniaud.

STOP, 68 artistes s’engagent, collectif

Cela fera tellement longtemps qu’on vous en parle au futur que vous serez surpris d’y être. Et vous vous apercevrez que le futur, en fait, c’était hier, déjà ou maintenant, dans le meilleur des cas. Alors évidemment, ça vous parlera ce STOP majuscule sur fond de chaleur de feu de fumée. Ça vous parlera tellement que vous vous ferez la remarque que le titre contient ce qu’il faut de pour qu’un pitch apparaisse ridicule ampoulé emphatique voire pathétique par rapport à cette concision cette urgence cette alarme. Il sera urgent d’oublier les ponctuations pour éviter le poing final que l’on se donne depuis des lustres dans la tronche comme un boxeur d’Harry Crews. Il sera urgent de bâtir un nouveau temps, une osmose de passé, de présent et de futur, temps relégués de l’ancien monde. Il sera urgent de lire STOP !

« Le système du capitalisme sauvage et mondialisé a deux effets concomitants : la destruction de l’humain et la destruction de la nature. » écrit Alain Liévaux. Le problème c’est que « Le capitalisme est l’air que nous respirons. «  rajoute Olivier Bordaçarre. Vous ferez le lien facilement. Vous en conclurez ce que vous en conclurez. À défaut d’avoir peur de mourir, il ne faudrait pas avoir peur de vivre. Ce livre sera la grenade ou le virus car l’époque ne sera (n’est déjà) plus aux pansements ni aux baumes.

STOP, 68 artistes s’engagent, La Manufacture de livres (2023, 285 pages, 15€). Je sais que vous l’avez lu car Miranda l’avait prédit, . Livre reçu en service de presse ; merci à Flora Moricet.

Ainsi Berlin de Laurent Petitmangin

Dans un Berlin qui n’en finit plus de finir (ses murs se délabrent, tiennent la nuit et s’effondrent au matin) et de (re)commencer (construire une nouvelle patrie sur les restes du Troisième et sous les conseils de grand frère n’est pas de tout repos), Gerd est partagé entre deux femmes : Käthe, l’Allemande dont la peau est aussi douce que l’esprit rêche et Liz, l’Américaine, jeune veuve que les attaches ne retiennent plus dans son pays natal, qui oeuvre à la reconstruction en tant qu’architecte et qui est une promesse.

Il couche avec la première et rêve de la seconde.

Dans le cadre du programme Spitzweiler, on organise en RDA la reproduction entre élites scientifiques (« La première à tomber enceinte fut Marieke. » p.63) afin de former une génération d’individus supérieurs censée faire la gloire du régime afin d’enfoncer l’ouest et d’écœurer l’est. Que ces enfants soient retirés à leurs parents et confiés à d’autres pour qu’ils ne gênent pas le progrès en marche importe peu. La valeur nie les valeurs. « Je l’ai dit, tout cela démarra dans un esprit sain, et ne se mit en œuvre que pour le bien de la nation et le développement de son élite, et même si ce système s’embarrassait peu des velléités des parents, et montrait même une certaine sauvagerie, à l’aune d’une guerre qui avait fracassé tant de gens et envoyé en première ligne des milliers de jeunes cela restait acceptable et cohérent. » p.76-77

Après Ce qu’il faut de nuit, multi primé, Laurent Petitmangin avec Ainsi Berlin s’enfonce encore davantage dans les nuances, méandre dans les choix, joue des doubles et triples situations. Il quitte la France pour l’Allemagne, le présent pour le passé. Il livre encore la peinture d’une âme tiraillée entre deux choix, moins personnels qu’universels, entre la rectitude et l’ouverture, l’idéal est malmené, l’ennemi* désigné mais flou et le combat livré l’est tout autant contre soi-même que contre l’autre.

* On pense à Desproges : « L’ennemi est bête : il croit que c’est nous l’ennemi alors que c’est lui !”

Laurent Petitmangin, Ainsi Berlin, La Manufacture de livres (2021, 267 pages, 18€90). Livre acheté en librairie, aux Instants libres.

La Résistance des matériaux de François Médéline

Ce courant français de politique fiction est en verve ces temps-ci et tant mieux. Il était temps que les écrivains français s’emparent de leur présent pour le tordre (tondre ?) un peu afin de lui donner ce goût de crédibilité que la politique perd ou a déjà perdu. Bronnec (lire ici), Leroy (lire ici) – de la maison, Paulin (lire ) pour ne citer qu’eux, tracent le sillon. François Médéline aussi.

Ce dernier s’attaque, en gros, à l’affaire Cahuzac, retentissante histoire – les yeux dans les yeux – dont l’actualité nous rappelle ce qu’il fit puisqu’il revient mais il va bien au-delà. Et ça démarre fort, sans introduction ou presque. Djamila Garrand-Boushaki, beurette de banlieue deputée suppléante du ministre de l’intérieur Serge Ruggieri apprend que ce dernier aurait, selon Mediapart, un compte au Luxembourg. « Il est juste dans la merde. » Mais Djamila pense « qu’elle survivra » (p.32). On a à peine eu le temps d’apprendre que Macron était « un connard arrogant avec les dents du bonheur » (p.16), Hollande un « pépère » qui « aime les gens » sauf Fabius, « bouffer », faire « des blagues » (p.28), Ayrault « une tête d’endive » dont le « patronyme n’entrera dans aucun livre d’histoire. » (p.27) que le cartel de Médéline s’étoffe de personnages plus complexes, comme le commandant Dubak borgne qui va jeter son œil comme on jetterait autre chose dans la soupe, Gérald Hébert, barbouze dont les enfants Louis et Maximilien prêtent au personnage un aspect révolutionnaire inquiétant… On comprend alors qu’on ne va pas être dans le politiquement correct – et c’est rafraichissant – même si les personnages principaux du roman sont fictifs, on pourrait presque les reconnaître – c’est ballot. On lit entraîné dans un tourbillon vers l’abime d’une bonde…

Dans un style dépouillé, syncopé, elliptique (on sent l’influence d’Ellroy) sujet-verbe-complément, bâtissant des phrases courtes, allant souvent à la ligne, l’enquête ressemble à un compte rendu vachard qu’on pourrait afficher sur le mur des cons. Je ne sais si François Médéline sert la politique mais il dessert la vanité, l’ambition, le pragmatisme et surtout, la manipulation, et il accroche la médaille d’or à la violence d’où qu’elle vienne. « La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil« *. Le pouvoir est maudit par essence alors qu’est-ce qu’on attend pour y mettre le feu ?

* René Char

La Résistance des matériaux, François Médéline, La Manufacture de livres, 2024, 488 pages, 21€90

Livre reçu en service de presse – épreuves non corrigées. Merci à Flora Moricet.

C’est en hiver que les jours rallongent de Joseph Bialot

Jo est né en 1923 et mort à Auschwitz en 44. Revenu de là bas, il écrira jusqu’à sa mort en 2012.

Déporté à 21 ans à Auschwitz, Jo y restera jusqu’à la libération du camp en janvier 1945. Ce sont ce mois-là qu’il transcrit et les suivants où il a perdu son humanité puis a tenté de la reconstruire pour devenir un homme, un mari, un père, un salarié, un écrivain. Et, un jour, devant un reportage sur Auschwitz, il ne reconnaît pas le camp tant les arbres ont poussé depuis. Il s’en inquiète à une amie, ancienne déportée : « – Que veux-tu, les arbres ont poussé après notre mort. » (page 12) Viendra alors, après le temps pour se taireun temps pour écrireC’est en hiver que les jours rallongent est le récit accouché de ce temps-là, ces deux temps-là.

Lire le papier consacré à cette réédition (publié une 1ère fois au Seuil en 2001) et un entretien écrit avec l’auteur qui date de 2009.

C’est en hiver que les jours rallongent de Joseph Bialot, La Manufacture de livres (2023, 352 pages, 18€90). Livre reçu en service de presse ; merci à Flora Moricet.

La faute de la traductrice de Dominique Forma

Celui-là aussi vous l’avez lu. Miranda l’avait prédit, ici.

Solange, jeune traductrice pour une entreprise d’envergure internationale, tombe dans les filets de son chef de service à corps acceptant et se voit missionner avec lui pour la signature d’un contrat en Argentine. Seulement voilà, elle ne veut plus lui céder et veut reprendre le cours de sa vie, les rênes de son corps et le cours de sa carrière. Mais le boulot, c’est le boulot, la voilà envolée avec le malotru qu’elle remet en place dès l’avion. Elle croit reprendre la main mais elle va se la faire prendre dans un engrenage qui va la dépasser. Un mystérieux vieillard, dans un restaurant vide, s’invite à sa table. Il a l’accent germanique – du passé qui ne passe pas – comme cette intrigante première scène du roman le laissait supposer avec un Sieg Heil ! Sig Heil ! clamé lors de l’enterrement de Don Riccardo Seeber, alias Heinz. En 1959, les souvenirs sentent encore la rancœur. L’héroïne de Dominique Forma est bien brinquebalée dans cette histoire et vous tenterez de surnager avec elle dans ce court roman à lire d’une traite, comme une lutte dans laquelle on ne lâche rien mais où on est lâché. Il est des combats qu’il faut mener même si la déception est au bout pour se dire qu’on aura au moins essayé. Les histoires d’amour terminent mal, en général mais les histoires de cul aussi, en particulier. Vous aurez compris la leçon. Éviter d’être au mauvais endroit au mauvais moment avec la mauvaise personne. Ce ne sera pas compliqué, si ? Suffira de tenir ses phéromones (« Les hommes, cela devrait rester habillé tout le temps, même au lit, même durant l’amour. ») à la maison et éviter de faire la conversation dans un restaurant vide à un fantôme nostalgique passéiste du « bon vieux temps c’était mieux avant »… Ça aidera…

Dominique Forma, La Faute de la traductrice, La Manufacture de livres (2023, 202 pages, 16€90). Livre reçu en service de presse ; merci à Flora Moricet.

On dirait des hommes de Fabrice Tassel

Prix Découverte Claude Mesplède 2023, On dirait des hommes est un thriller psychologique remarquablement écrit.

« – Mais je pensais que l’affaire était finie. » (p.45)

Elle l’est mais la juge d’instruction Dominique Pontet aime à rendre hommage aux victimes jusqu’au bout : « Rendre justice, c’est aussi réparer, panser, cautériser, nous sommes des médecins de la mémoire. » (p.49). Elle use le délai légal dans sa totalité. Un an. Gabi mérite bien cela. 10 ans. Noyé suite à une chute de la jetée et que son père n’a pu sauver dans des flots aussi sombres qu’agités. La mère de Gabi, Anna (« Mon dernier geste (…) a été de bien fermer son anorak jusqu’en haut. » p.58) et son père, Thomas, se reconstruisent : ils n’ont pas divorcé, ils n’ont pas quitté la région, ils sont soudés, unis. La clôture du dossier serait leur nouveau point de départ. Et pour cela, il faut finir « la vie judiciaire d’un petit noyé de 10 ans. » (p.46) En attendant, il y a les affaires courantes, les affaires conjugales, les affaires où l’un, Patrice, frappe l’autre, Iris. Quand la plainte est là, il faut la porter. A deux, victime et juge, le fardeau devrait pouvoir retomber sur celui qui l’afflige : il faut lui faire sentir le poids du fouet, celui qu’il tient et celui qui pourrait le corriger.

On dirait des hommes mais ce n’en sont pas.

Ce sont des lâches. Ils ont l’ambition de passer à côté de leur vie en croyant l’adoucir. Ils veulent régler le bruit et imposer le silence. Et ce sont des menteurs. Et sur un mensonge, on ne peut construire qu’un plus gros mensonge. Elles, ce sont des femmes. La clairvoyance pour Anna. Qui sait écrire les lettres qu’on n’envoie pas. La ténacité pour Dominique. Qui sait creuser quand il suffirait de remplir. Le courage pour Iris. Qui sait, que si elle ne prend pas les coups, d’autres en prendront à sa place.

Dans une langue concise, liquide, directe, Fabrice Tassel livre une partition mélancolique qui effleure les sentiments et affleure l’âme. Qu’on en ait ou pas, on frissonne en avançant vers l’inéluctable qui ne l’est que parce que, chevillé au corps, une femme a le souci de rendre la justice et d’autres l’envie d’aller en avant. Avant que de s’affadir dans les méandres administratifs et hiérarchiques, avant que de combler ce que l’on attend d’elle, avant que d’obéir à l’avenir ou aux coups qu’on leur trace, des femmes tiennent leur rang.

On ne peut pas en dire autant des hommes qui tournent autour dans le manège quotidien. Mais ce sont des hommes. Avec leurs faiblesses pour squelette, leur renoncement pour ambition, qui croient voir la lune alors que c’est simplement le bout de leur doigt, l’index pour les autres, le pouce pour eux, voire le poing. On dirait des hommes mais ce n’en sont plus.

Fabrice Tassel, On dirait des hommes, La Manufacture de livres (2023, 282 pages, 19,90€), finaliste du Prix Mystère de la Critique 2024. Livre acheté en librairie, au Instants libres.

Donnons le dernier mot à Jean-Hugues Oppel. Pourquoi ? Parce qu’il est plus costaud que moi et que ses mots portent plus fin que les miens et que c’est un auteur estampillé La Manufacture et qu’il a bien voulu se soumettre au 5/5 que le monde de l’entretien écrit nous envie. Merci Jean-Hugues.

5/5 avec Jean-Hugues Oppel

un auteur de La Manufacture de livres

Qu’est-ce qui caractérise le mieux la maison d’édition La Manufacture de livres et son créateur Pierre Fourniaud ?

Le mot « éclectique », je crois. Ouvrages documentaires, beaux livres (sérieux ou coquins), livres-enquêtes, polars de toutes les couleurs du Noir, romans flirtant (et plus si affinités) avec le fantastique et la science-fiction, littératures générales au sens… littéralement plurielles – il y en a pour tous les goûts, quoi !

Comment êtes-vous arrivé à La Manufacture ?

C’est ma troisième vie littéraire, après mes débuts en Série Noire chez Gallimard suivis d’une longue riche et fructueuse liaison en Rivages/Noir. Quand celle-ci s’arrête, cherchant où déposer de futurs manuscrits, je me souviens de ma rencontre (lors d’un festival normand) avec Pierre Fourniaud, avant qu’il ne soit éditeur; j’en gardais un excellent souvenir (scellé dans les brumes tourbées du meilleur des distilleries écossaises), et sa Manufacture commençait alors à prendre une bonne place dans le paysage éditorial, polar bien sûr (mais pas seulement – voir plus haut).

Un auteur que vous n’auriez peut-être pas lu s’il n’était pas à La Manufacture ? Et un auteur que vous verriez bien à La Manufacture et qui n’y est pas (encore) ?

Tous ceux et toutes celles que j’ai lu(e)s depuis que j’y suis (pas de jalousies, donc pas de polémiques), et pour le reste… surprends-moi, Pierre !

Pensez-vous que les couvertures (et l’objet livre en général) soient (aussi) pour quelque chose dans le succès de La Manufacture ?

La charte graphique (qui n’est pas arrivée tout de suite, précisons-le*) des romans, photo avec bande centrale décalée en faux relief, c’est LA signature de la maison** : on reconnaît un livre de La Manufacture de loin, alors est-il besoin d’insister ? Sinon pour saluer ici tout le talent de dame Lacoma qui sait ce que choisir une couverture veut dire, et en y associant toute l’équipe de fabrication.

* En effet (ndbbb – voir illus…). ** Voir illustrations plus haut.

Qu’est-ce qui pourrait arriver de mieux à La Manufacture cette année ?

De… continuer !

Manzini (Antonio)

erde ! À l’heure où je découvre cet auteur*, il se murmure que l’éditeur français, Denoël, arrêterait la traduction de cet auteur italien, Antonio Manzini, alors qu’il reste, à l’heure où j’écris ces lignes, 4 tires non traduits : Fate il vostro gioco, 2018, Rien ne va plus, 2019, Ah l’amore l’amore, 2020 et Le ossa parlano, 2022. « Mecojoni ! » (Ombres et poussières, p.60) Je ne sais si c’est vrai mais l’exemple de Ken Bruen, je ne m’y fais toujours pas, ne me rend pas confiant… Toujours est-il que nous avons aujourd’hui à notre disposition les six premières aventures du sous-préfet – vicequestore en italien – (pas commissaire !**) Rocco Shciavone (toutes éditées chez Denoël et traduites par Samuel Sfez, sauf le tome 2, Froid comme la mort, par Anaïs Bouteille-Bokobza).

* grâce à Milieu hostile, rendons à Frédéric Dupuis… ** « Ce grade correspond en réalité à celui de commissaire, et s’appelait d’ailleurs commissario jusqu’à une réforme récente de la police italienne. Mais pour Schiavone, la différence est importante, bien qu’on ne sache pas trop pourquoi. » Samuel Sfez in Milieu hostile. cf p.35 de PN : « … je ne sais pas si tu l is les circulaires, si tu t’informes, mais dans le corps de police italienne, les commissaires n’existent plus. » Idem p.31 de Froid comme la mort.

Rocco Schiavone, c’est avant tout pour les hommes, les vrais. Le sous-préfet (et arrêtez de l’appeler commissaire, ça l’énerve) est un macho convaincu, coureur de femme et, ami.e.s de la poésie féministe, qui aime « la chatte. Tu n’as pas idée de la quantité de chatte qu’il y a à Rome. » (Piste noire, page 23)

Le sous-préfet Rocco (quel prénom !, on comprend…) Schiavone est muté dans le val d’Aoste suite à une « indélicatesse » (p.23, PN), à Champoluc (« Décision venue d’en-haut » – page 65 PN). Il est ravi (« Quand vous étiez encore dans vos cavernes à vous gratter les poux, à Rome on tait déjà pédés ! », p.37 PN). Entouré de crétins (« – Monsieur, ici l’agent D’Intino. – Quel bon vent ? fit Rocco (…) – Il y a du vent ? demanda l’agent D’Intino, surpris. » – page 63 PN) qui rappellent le Catarella de Montalbano dans les Camilleri*, perdu sans sa femme, égaré chez son amante, il doit résoudre le meurtre d’un local écrasé par une dameuse et trouver une paire de chaussures autre que ses Clarks (12 paires détruites en 8 mois, Un Homme seul, p.142).

* À qui l’auteur aurait demandé des conseils et Camilleri lui aurait répondu : « Débrouille-toi ! » in Milieu hostile, url citée.

dans Maudit printemps (à nouveau p.47 puis p.73 dans UHS ou D’Intino invente le frappement secret…)

Quelque peu soupe au lait, grognon ronchon totalement misogyne (il faut lire comment il traite Anna, sa maîtresse, p.216 de MP), fumeur de joints (« Je me mets des compresses de romarin pour le rhume » dit-il pour justifier l’odeur, FCLM, p.23) et à cheval sur l’illégalité, ce héros flic récurrent devrait vous agacer. Mais il devrait aussi vous plaire.

« Le passé est un mort dont le cadavre n’arrête pas de venir te voir. De nuit comme de jour. » (p.110, PN)

Car l’homme a des côtés politiquement incorrects rassurants, un humour grinçant, subit sa vie (« il était traîné dans la vie par ses cheveux », p.48, FCLM ou p.35, MP) et des failles personnelles qui le rendent attachant (il emmène à Turin 87 Sri-Lankais trouvés entassés dans un container : « Ils avaient un contact pour du travail. », p. 201, PN) sans que l’on développe une profonde empathie, on le plaint. Car au fil des enquêtes – j’ai lu les 4 premières, il m’en reste deux, ça se déguste – c’est la mort de sa femme (la perte, pas l’absence, p.62, MP), Marina, qui semble être la seule enquête que l’on aimerait voir résoudre* tant elle pèse sur lui et il quête le pardon de ses beaux-parents (FCLM, p.190) qu’il n’obtient pas. Il dialogue avec elle constamment (en italique dans le texte) et elle ne lui rend pas la vie facile.

* 07.07.07, 5e aventure de Rocco semble être l’histoire de cette « disparition » dont on apprend de plus en plus que les tomes avancent son histoire…

Rocco souffre de sa disparition et aussi d’un certain nombre d’emmerdements dans sa vie qu’il classe selon une échelle qui commence au niveau 6. Le pire, « la mère de tous les emmerdements », étant une affaire à résoudre qui est « un bel emmerdement niveau dix. Peut-être même avec les félicitations du jury ». Ses collègues vont s’en amuser en la placardant sur la porte de son bureau. Autant vous dire qu’à chaque tome, le niveau 10 est atteint. Il les développe dans FCLM, p. 44 : « Dans son échelle personnelle de valeurs, au sixième niveau il y avait les enfants qui crient a restaurant, les enfants qui crient dans les piscines, les enfants qui crient dans les magasins, les enfants qui crient en général. Puis les coups de fils qui offrent des contrats impossibles d’électricité-eau-gaz-téléphone mobile, la couverture qui glisse du matelas et découvre les pieds par une froide nuit d’hiver et les apéros dînatoires. Au septième niveau, il y avait la lenteur du service au restaurant, ceux qui s’y connaissent en vin et le collègue qui avait mangé de l’ail la veille au soir. Au huitième, les spectacles qui duraient plus d’une heure et quart, faire ou recevoir des cadeaux, le vidéo-poker et Radio Maria. Au neuvième niveau figuraient les invitations aux mariages, baptêmes, communions ou simples fêtes. Les maris qui se plaignent de leurs femmes, les femmes qui se plaignent de leurs maris. Et au dixième niveau, sur la plus haute marche du podium des emmerdes, le pire que la vie puisse lui offrir pour lui gâche sa journée, il y avait le fait d’avoir un homicide sur le dos. »

Il rajoute encore d’autres éléments p.71, MP : Au « sixième degré, on trouvait les plombiers et les maçons qui avaient tendance à ne jamais respecter l’horaire annoncé, les zéros de l’IBAN, les motos qui pétaradaient, les vieux stylos quand il avait besoin de prendre des notes rapidement. Au septième degré, on trouvait les cacas de chiens sur le trottoir, perdre son marque-page et la finger food. Au huitième, les courriers des impôts (…) aller à la messe (…), le sable dans les palourdes, le vin bouchonné et déjeuner après deux heures. Au dixième degré, souverain et impérial, figurait le plus bel emmerdement que la vie pouvait lui réserver : une affaire sur le râble. »

C’est aussi succulent que les listes à la Bruen ou les habitudes alimentaires de Montalbano.

« – Bordel de merde, Schiavone ! (…) Vous voulez vous retrouver à faire des photocopies au ministère ? – Pourquoi pas (…). S’ils me maintiennent mon salaire, pas de problème. » (page 222, PN)

Rocco a aussi, c’est un homme qui a des principes, a établi ses propres règles. Il appelle ça la constitution romaine. Elle apparait dans l’épisode 4, Maudit printemps : « Les tramezzini, c’est une chose sérieuse, Italo. On ne plaisante pas avec le tramezzino. Pain blanc, rigoureusement blanc. Sont admis thon, artichauts, tomates, salade de poulet, épinards et mozzarella. Personnellement, je n’aime pas les crevettes et le fromage, encore moins le jambon. D’après moi, le tramezzino au jambon passe de fait dans la catégorie des toasts. Et la mayonnaise doit être faite maison, légère et jaune clair. Mais surtout, mets-toi bien ça dans la tête une fois pour toutes, Italo, le tramezzino doit être gardé au frais sous un torchon humide. Si tu entres dans un bar et que tu les trouves emballés dans du cellophane, enfuis-toi ! Ce ne sont pas des tramezzini. Ce sont des cadavres, des trucs en putréfaction ! Le tramezzino doit reposer sous un coton humide. Article 3 de la Constitution.
— Article 3 de la Constitution ? Mais qu’est-ce que tu racontes ?
— La Constitution romaine. Tu veux que je te dise les deux premiers ? Le premier dit : ne pas casser les couilles. Le deuxième : ne jamais passer en voiture sur le Lungotevere le samedi soir. Et le troisième : le tramezzino repose sous un torchon humide.
— C’est toi qui l’as écrite ? »

Samuel Sfez l’a gentiment « donnée » à Milieu hostile, elle est tordante :

Article 1 : Ne pas casser les couilles. (Maudit printemps) / Article 2 : Ne jamais passer en voiture sur le Lungotevere le samedi soir. (Maudit Printemps) / Article 3 : Le tramezzino repose sous un torchon humide. (Maudit printemps, p.45) / Article 4 : Les artichauts frits. (Un homme seul, p.215) / Article 5 : Ne jamais secouer les miettes de la nappe sur le balcon, à moins que tu ne veuilles te lancer dans l’élevage de pigeons. (Un homme seul, p.216) / Article 6 : Ne jamais aller manger des sushis près de la place Vittorio Emanuele, parce que c’est des Chinois et qu’ils ne savent pas faire les sushis. (Un homme seul, p.216) / Article 7 : Un sticazzi bien placé résout mille problèmes. (Ombres et poussières)

Au fur et à mesure que l’on lit les aventures de Rocco, le plus souvent déclinées en jours et non pas en chapitres, on perd ce côté whodunit (je sais qui est l’assassin) du premier tome, Piste noire, pour des intrigues plus noires ou sociales (Froid comme la mort), le thriller intuitif (Maudit printemps) ou le roman politique avec la ‘Ndrangheta qui étend ses tentacules (Maudit printemps et Un homme seul)…

Antonio Manzini / Série Rocco Schiavone (Denoël, existent aussi en Folio policiers)

tous achetés d’occasion.

Piste noirePista nera, traduit par Samuel SfezDenoëlSueurs froides, 2015, 250 pages, 20€50 (Folio Policiers n°792, 8€30)

Froid comme la mort, La Costola di Adamo, traduit par Anaïs Bouteille BokobzaDenoëlSueurs froides, 2016, 251 pages, 20€50 (Folio Policiers n°832, 8€30)

Maudit printemps, Non è stagione, traduit par Samuel SfezDenoëlSueurs froides, 2017, 291 pages, 20€50 (Folio Policiers n°851, 8€90)

Un homme seul, Era di Maggio, traduit par Samuel SfezDenoëlSueurs froides, 2018, 346 pages, 20€90 (Folio Policiers n°877, 8€90)

07.07.07, 07.07.2007, traduit par Samuel SfezDenoëlSueurs froides, 2020, 387 pages, 22€90 (Folio Policiers n°962, 9€40)

Ombres et poussières, Pulvis et umbra, traduit par Samuel SfezDenoëlSueurs froides, 2022, 413 pages, 22€90 (Folio Policiers n°1008, 9€40)

Mariée de corail (La) par Roxane Bouchard

audite Mer de Gaspésie ! Elle avale Angel qui « a la foi rêveuse des damés de la mer » (p.15), une des rares femmes à pêcher dans le coin, celui des pécheurs de morue, de crevettes, de homards. Son bateau c’est un homardier, L’Échoueuse II.

La Mariée de corail de Roxanne Bouchard (L’Aube noire, 2023, 448 pages, 21€90) était un de mes 10 polars de l’année 2023 ! Il a même remporté le Prix Mystère de la Critique 2024* du roman francophone (avec Dennis Lehane et Le Silence, Gallmeister, pour le roman étranger – il est des compagnies plus désagréables…). La Mariée de corail est un roman magnifique, une claque qui a le goût salé d’un baiser.

* auquel, honneur que je savoure, j’ai participé pour la première fois cette année.

Il a un cellulaire mais ne décroche quasiment jamais. Il a un fils mais la communication passe mal ; une barre tout au plus. Il arrive sur une enquête avec 14 heures de retard. Sa collègue le lui reproche et ça coince entre eux. En Gaspésie de la belle province de Québec où on vit de ce que la mer nous prête sous le reflet et la surveillance de la lune, une femme a disparu à bord de son bateau

Joaquim Moralès est appelé pour en devenir l’enquêteur. Ça ne l’arrange pas, son fils Sébastien vient d’arriver. Que veut-il ? Et sa femme qui ne le rejoint pas ici, depuis des mois, qui est restée là-bas. Que fait-elle ? Et son chum Cyrille qui est en train de mourir et qui attend qu’il lui raconte la mer, chaque jour, la mer qui épuise même le vent « fatigué par sa journée de travail à fouetter la mer, à brasser l’écume, à tenir les vagues en éveil. » (p.104)… Il hésite puis finit par y aller : « – Parce que c’est une femme qui a disparu » (p.40) et, comme le dit Cyrille : « – Cette fille-là aussi, c’est la fille de quelqu’un ! » (p.47). Avec 14 heures de retard, comme le lui fait remarquer Simone Lord.

Le premier chapitre donne le ton. Empreint d’une poésie noire qui ne laisse d’autre espoir que celui de se réjouir d’avoir vécu : « Elle ouvre grands les yeux, regarde la lune une dernière fois, et ne les referme plus. » (p.16), nous précédons Joquim Moralès dans son enquête en assistant à la fin d’Angel, à son identification, aux circonstances de son décès, au constat de sa disparition, à son rapport d’autopsie. « Il n’y aucun témoin direct dans cette affaire. » (p.15), ne manque que son instigateur…

La Mariée de corail est un roman d’une grande empathie, qui prend le temps de cerner les âmes, le territoire et la mer qui l’enserre. Il s’agit du portrait, de la photographie d’une femme, qui, imprimé en Joaquim Moralès, va rejoindre les autres. « Tous ces portraits cumulés, dont il ne parle jamais, ont créé un recueil de souffrance qu’il porte dans sa mémoire tel un album de famille. » (p.69)

Car il a deux familles Moralès qu’il tente de comprendre : celles des morts pour qui il cherche une explication, avec des personnes qui se taisent définitivement et celles des vivants avec laquelle il aimerait tant s’expliquer mais, qu’en taiseux qu’il est, il n’ose aborder de face. Sébastien son fils, le sait bien, il est pareil : « Son père est un silence qui ne s’ouvre pas, qui s’entrebâille à peine. » (p.196)

Et le fils, il est venu pour faire danser les filles du coin ? Se saouler et faire des « expériences culinaires » ? C’est ce qui lui est venu à l’esprit pour expliquer son arrivée. Et sa blonde alors ? Joaquim ne comprend pas. Mais comme lui explique son collègue Lefebvère, son fils ? « Il est bien parti pour mal finir. » Car, « je sais pas si t’as remarqué, mais quand on aime, on regarde juste une femme » (…) « comme si toute la beauté se condensait en elle. » Quand un gars fait danser plein de filles, ça veut dire que la beauté se disperse. » (p.118)

Et Angel, a-t-elle aussi un problème de cœur, de vie au point d’en finir, seule, en mer, avec son homardier ? C’était son genre ? « Son genre, enquêteur Moralès, c’est de rester vivante. » (p.182)

Serait-ce un veule problème d’argent ? « La même affaire que partout le long de la côte : ceux qui étaient riches sont devenus plus riches. Pis ceux qui étaient pauvres ont fermé leur gueule. » (p.333)

La famille, nucléaire d’Angel, la grande, des pécheurs est plus proche du banc solidaire ou du panier de crabes ?

La morale de cette histoire nous est donnée par Cyrille, à Sébastien, juste avant de faire le dernier voyage : « Continue à regarder la mer pis je te le jure : à un moment donné, tu vas la voir. » (p.155) Une autre formule du doigt et de la lune…

« Les criminels s’inventent une histoire à laquelle ils croient. » affirme Moralès. Nous, non seulement on y croit mais on adhère à La Mariée de corail. Et ça donne envie de se plonger dans le premier roman, Nous étions le sel de la mer.

Papier déjà publié sur bbb, . Livre reçu en service de presse, merci à Isabelle Lacroze. Papier écrit en écoutant Plume Latraverse, comme Ti-Jésus ou Le Blues de la bêtise humaine

Masque (Le) (et la plume)

ouais. Le Casque et l’Enclume comme dirait JiBé. Ils sont drôles, incisifs, se damneraient pour un jeu de mots, cruels et cultivateurs non de l’entrisme, ce serait succulent, mais de l’entredeuxisme. C’est pour tout cela qu’on les écoute. Jérôme Garcin parti, on ne pourra plus l’accuser d’auto-népotisme, du moins plus dans cette émission. C’est Rebecca Manzoni, croisée au Mouv’ autrefois sur un festival du polar dans le sud, qui s’y colle désormais. Elle a changé beaucoup de joueurs (qui sont parfois partis d’eux-mêmes, ben quoi, sans Jérôme c’est plus avec), y a transféré des joueuses et on peut lui faire crédit, au mois pendant un temps – certain aurait dit Raynaud. Mais quand même, ça cause pas beaucoup de noir sur cette onde à l’heure où on dine. Et quand par hasard, pas rasé, un roman sombre y entre, la lumière se fait sur lui et l’incendie avec style, je n’ai rien contre un bon polar mais là c’est un mauvais. Hé bien les gars, les filles aussi, libre à vous de parler des bons, on vous attend, si vous ne savez pas qui choisir, on peut donner des noms, j’ai des listes comme dirait Bérégovoy.

La condescendance ne va pas jusqu’à considérer le genre, il existe, ils le reconnaissent, vous voulez qu’ils le goûtent ? Nan. Comme le Goncourt qui n’est donné qu’à un membre de la famille quand celui-ci la quittée (Vautrin, Mathieu, Lemaitre…), on ne parlera de romans noirs au Masque et la Plume que quand celui-ci aura disparu dans le tunnel blanc immaculé de la Littérature, avec un grand L.

Bref, sans aller du fatigant la critique est facile mais l’art est difficile, autrement, comme disent les autres, on ne peut plus rien dire, faut se positionner coco ! Entre la promotion et l’éradication, les nuances existent. Quand on critique, d’abord on lit. Il est bon de le rappeler. Puis on met des mots. J’ai la prétention, ici, d’écrire des critiques, pas de faire un résumé discussion. Enfin, il faut émettre un avis et c’est là qu’il faudrait éviter de blesser. D’un autre côté, est-ce qu’ils se gênent les auteur.e.s pour nous infliger leur prose ? De l’autre, a-t-on du temps à perdre pour dire tout le mal que l’on lit quand on en manque pour dire tout le bien que l’on lit par ailleurs ? Est-on, comme certains aiment à l’être, scotché par un livre ou, à l’inverse que le livre vous tombe des mains ? Sans être tiède systématiquement, on peut aimer même si, on peut apprécier encore que. Autrement, y a plus qu’à noter bien, pas bien.

J’ai coutume de dire que le meilleur retour que l’on peut me faire d’une critique que j’ai écrite soit celle qui me dise : ça m’a donné envie de lire ou ça m’a permis de faire un tri. Mais, en fait, celle qui est la plus intéressante, c’est celle qu’on me fait parfois : alors tu as aimé ou pas ? J’ai envie de dire : à ton avis ?

Matin brun (Franck Pavloff)

illions. Oui, vous avez bien lu. Cette nouvelle, de Franck Pavloff, publiée par Cheyne, s’est vendue, depuis se 1ere édition en 1998 à 2 080 000 exemplaires ! Rééditée en 1999, 2001, 2002, 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, 2008, 21009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 20145, 2016, 20217, 2018, 2019, 2020, 2021 et 2022, Matin brun est un phénomène.

« Quand ils sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste. Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.  Quand ils sont venus chercher les juifs, je n’ai rien dit, je n’étais pas juif. Quand ils sont venus chercher les catholiques, je n’ai rien dit, je n’étais pas catholique. Puis ils sont venus me chercher. Et il ne restait personne pour protester… » Martin Niemoller (1892-1984), Dachau 1942

11 pages narrant une dystopie totalitaire où la bêtise est érigée en loi : tous les chiens non bruns doivent être piqués : « Mince alors, c’est comme pour les chats, maintenant ? » Ben oui. Mais pourquoi s’arrêter là ? La législation ne se limiterait pas à celui qui a un chien non brun mais aussi à celui qui en possédait un avant la loi. De la rétroactivité comme symbole d’une déclaration du reniement de tous les droits de l’homme. Ce dernier n’a plus aucun droit pendant que l’État a sur lui tous les droits.

Une parabole à la mesure du poème du pasteur Niemollen comme un cri à destination de l’humanité. N’attendons pas que l’indignité nous glace, l’iniquité nous fige, la honte nous terrasse, indignons-nous, révoltons-nous, résistons dès la première seconde où on tente de nous soumettre. Ils ne seront grands que parce que nous resterons à genoux. L’esprit de Manoukian ne souffle pas uniquement au Panthéon ou alors c’est à désespérer…

Par un auteur du noir, le bougre Franck Pavloff a commis d’autres écrits (Le Vent des fous, Après moi Hiroshima, L’Espérance est ma patrie) que je vous conseille de lire (Lire à P)… avant qu’il ne soit trop tard et qu’on nous l’interdise…

Matin brun, Franck Pavloff, Cheyne, 2€50

Maugendre (Paul)

onsieur un livre par jour ! Sur son blog, Les lectures de l’oncle Paul, Paulo, que l’on appelait Paul Maubru à Caïn, publiait, qu’il vente, neige, pleuve, une critique par jour (!) et avait délaissé les nouveautés (Tout le monde fait ça me disait-il*) pour ressortir des bouquins dont plus personne ne parlait qui vantait la littérature populaire dans tous ses aspects possibles. Un livre par jour jusqu’à ce 18 avril 2021 où il ne publia rien et depuis, rien. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles. Mouais…

* Alors que je lui annonçais que j’avais voté pour lui en 2018 pour le Trophée Maurice Renault de 813, comme en 2017 (tout en ne partageant pas tous ses choix éditoriaux) pour sa régularité (une critique par jour), sa célérité de serial lecteur et par ses trouvailles, il me répondait : « Le roman noir n’est plus du tout ma tasse de thé, trop déprimant. Alors je picore à gauche et à droite, et même au centre, et cela me fait penser à un arbre qui étalera ses branches fièrement, alors que stationné dans un seul genre, cela me réduirait à être l’équivalent d’un poteau téléphonique au pays des portables. »

Paul Maugendre est né en 1947 et peut s’enorgueillir d’avoir fait une carrière longue puisqu’il a débuté aux PTT (pas au P&T, il n’est pas si vieux) à l’âge de 17 ans. C’est à la radio qu’il livre d’abord ses chroniques, déjà un livre par jour, puis dans la presse spécialisée, fanzines et revues : Normandie Magazine, La Tête en Noir, Caïn, La Vache qui lit, L’Annonce-bouquins, L’Ours polar, La Revue des Amis de San Antonio, La Revue Indépendante… (merci Albert Wikipédia) Il va surtout se révéler comme un collaborateur dont on ne peut se passer (participant à Rocambole spécial G.J. Arnaud, Les Années Série noire, le DILIPO – avec Claude Mesplède, voir plus bas, Dictionnaire du Roman Populaire Francophone avec Daniel Compère) et un conférencier de qualité. Il a écrit aussi deux nouvelles pour L’Ours polar.

Que dire quand quelqu’un en répond plus et nous manque ? Lui laisser la parole. Il avait écrit ça pour Caïn (Vous avez reçu un message, où il critique la critique). Paulo, tu es ici chez toi.

Memento

ême les plus bas de plafond comprennent vite qu’il y a quelque chose qui cloche dans ce film de Christopher Nolan (2000) avec Guy Pearce, Carrie Ann-Moss et Jo Pantoliano.

Leonard Shelby (Guy Pearce) n’a plus de mémoire immédiate : il oublie dans la minute qui suit ce qu’il a fait dans la précédente aussi prend-il des photographies qu’il légende et se fait tatouer les informations primordiales et événements de sa vie (la mémoire dans la peau en quelque sorte). Il est aussi marqué par le souvenir flou du meurtre de sa femme violée et asphyxiée dans leur salle de bains après qu’il ait reçu un coup sur la tête et obsédé par la recherche de son meurtrier, un certain John G. (gravé sur sa peau, il y a « John G. killed my wife« ). Il est aidé par Teddy (Jo Pantoliano), un flic et Natalie (Carrie Ann-Moss), une serveuse. Mais sont-ils vraiment ce qu’ils disent être. Leonard doute.

“Les souvenirs sont malléables, ce sont des interprétations, rien de plus. Ils ne mesurent pas la réalité.». (Leonard Shelby)

Ce qui cloche, c’est que le film alterne les scènes en couleurs et celles en noir et blanc, séparées par la prise d’une photo polaroïd. Il faut un certain temps our comprendre dans quel ordre il faut remettre le tout. Le trouble de voir Teddy tué par Leonard dans la scène d’ouverture et de le voir vivant dans la deuxième aiguise notre attention. Rapidement, nous aussi on doute de tout quand Leonard se souvient qu’il était enquêteur pour une assurance et qu’il soupçonnait un assuré, Samy Jankins, de mentir sur son amnésie et convainc sa femme de son double jeu. Cette dernière, diabétique, pour vérifier s’il ment, décide de le tester en lui demandant sa piqûre d’insuline toutes les demies heures et son mari la lui fait. Y a-t-il un lien entre la situation de ce Sammy et celle de Léonard ? Sur sa main gauche est tatoué : « Souviens-toi de Sammy Jankis »

Teddy (Jo Pantoliano) et Leonard (Guy Pearce)

Le scénario et surtout le montage ont contribué de faire de ce film une œuvre culte (depuis ce 2e long métrage, le cinéaste a montré l’étendue de son talent ou, au moins, de sa notoriété : Batman Begins, Inception, Oppenheimer…) mais surtout une œuvre passionnante où suspense et émotion nouent et dénouent les conversations d’après. Ce film, on en parle plus longtemps* qu’on ne met à le voir. Et la fin ouverte laisse présager de nombreuses interprétations. La critique a accueilli plutôt positivement le film sauf celles qui ne cautionnent pas le genre et pensent contrairement à Gabin** qu’un bon film ce n’est pas qu’une bonne histoire.

* « Pour faire un bon film, il faut trois choses : un, une bonne histoire. Deux, une bonne histoire. Trois, une bonne histoire. »

Mémento reste l’archétype de l’enquête, la plus redoutable, sur soi-même, avec le crime initial, l’enquêteur, les suspects, les preuves (polaroïds, tatouages), les mensonges, les manipulations et la vérité troublée par la mémoire. On peut aimer le jeu*, avoir conscience de la prétention du scénario au bon sens du terme (exigence) ou le trouver faussement original (vanité), le procédé (montage) camouflant l’ordinaire (scénario). Une question de magie.

* Une sorte d’escape game selon Jean-Sébastien Massart, .

Mes soixante huîtres (Pouy)

« Lafotasoissantetuite » (p.19)

ieux que I got my mogette working ? Peut-être pas, non mais quand même. Elle a de la gueule cette nouvelle de Jean-Bernard Pouy, Mes soixante huîtres. Elle a tout pour plaire : un titre à la con, des références historico-soixante-huitardes et une chute qui claque la porte. Et le tout emballé dans une musique de la déconnante sérieuse, celle qui met les mots dans les verres à pied de saint-joseph, le taboulé au menu de la discussion et le paris-brest en dessert dans la gueule.

« La révolution, c’est une INITIATIVE. » (p.7)

À l’heure, et ça fait des années que ça dure, où il est de bon ton de remettre 68 dans la poussière de l’histoire et de ressortir les blouses de la naphtaline, il est rafraîchissant de prendre le parti du père contre ses enfants : « – On ne coopère pas avec une société en décomposition. » « – Papa, merde, on parle sérieusement ! – Moi aussi. » (p.5)

« À partir de là, tout est à l’avenant. Comme la poire. » (p.12)

C’est en quelque sorte la querelle des anciens qui lancent le débat (ex soixante-huitard.e.s attardé.e.s – avec l’inclusive, ça l’fait, non ?) et des modernes qui le refusent (« – Papa… Arrête… On t’agresse pas, on te rappelle simplement qu’on est en 2008. » p.7) C’est bien là le problème. Le temps passe (nous sommes en 2024) et la merde d’autrefois se remet à sentir. C’était mieux avant. Bordel non. C’est pour ça qu’ils l’avaient foutu. Vous l’avez oublié ? Pouy est là pour vous le rappeler. Et si vous n’adhérez pas, tant pis pour vous. Agonisez avec votre paris-brest et étranglez-vous avec votre saint-joseph, lui, il se barre. En claquant la porte et merde aux repas du dimanche en famille !

Un vieux, ne l’oublions pas, ça a de l’avance sur nous…

Mes soixante huîtres, Jean-Bernard Pouy, Éditions Folies d’encre, 2008, 22 pages, 4€

Mesplède (Claude), pape du polar

(1939-2018)

erde (re) ! Habuimus papam*. Nous avions un pape. Claude Mesplède est mort en 2018 avant l’aube de ses 80 ans. Il avait logiquement, par son érudition, sa gentillesse, sa reconnaissance, son unanimité pris la suite de Michel Lebrun (lire CDAP, Lettre L, partie 1), décédé en 1996.

* les latinistes me corrigeront…

Claudeu

J’avais eu la chance de le croiser a gauche à droite, plutôt à gauche d’ailleurs, à La Roche sur Yon au festival du polar, au Mans, sur Paris et partout où la fleur du noir poussait en milieu urbain. Sa disparition en 2018 a ancré ces époques-là dans les souvenirs nostalgiques peuplés de ceux qui nous manqueront. Je lui avais rendu hommage, à ma façon ici.

François Braud, Claude Mesplède et Jacques Jamet (Caïn) en 1995 (?)

L’entomologiste du noir

Infatigable lecteur, critique honnête et juste, il a toute sa vie vanté le noir, sous toutes ses formes en travaillant comme un soutier, à l’ombre des plus grands, ami fidèle (Pascal Dessaint en parle justement plus bas) et même personnage de roman (lire plus bas aussi), il a livré ouvrage de référence sur ouvrage de référence jusqu’à l’ultime DIctionnaire des LIttératures POlicières ou DILIPO (lire le CDAP, Lettre D) : « une véritable mine, un trésor d’érudition, de découvertes grâce à ses milliers d’entrées (Auteurs, Bibliothèques et associations, Collections et séries, Genres et sous-genres, Historiens et critiques, Illustrateurs et peintres, Maisons d’édition, éditeurs et directeurs de collection, Personnages, Thèmes, Pays, Revues et fanzines, Prix et festivals, Romans, nouvelles, anthologies et études) et ses dizaines de collaborateurs et collaboratrices (de Alfu à Zylberstein, en passant par Éric Libiot, Frédéric Prilleux, Marie-Caroline Aubert, Marc Villard, Stéphanie Benson…). »

DIctionnaire des LIttératures POlicières. (publié en 2003, réédité en 2007), préfaces de Guérif, de Pennac, chez Joseph K.

Avant le DILIPO l’érudit s’était fait remarquer par ses monographies sur la Série noire. SN, Voyage au bout de la noire avec Jean-jacques Schléret (1982, Futuropolis, 476 pages) est un inventaire de 732 auteurs et de leurs oeuvres (suivie d’une filmographie) de Aarons à Zackel. Chaque notice biographique s’accompagne d’une bibliographie. En 1985, il publie le tome 2 avec 72 nouveaux auteurs de 1980 à 1985, puis en 1996, une édition revue et augmentée chez Joseph k (627 pages) avec un cahier de couvertures, d’affiches et de photographies d’auteurs. En même temps, à partir de 1992, chez Encrage, il publie Les Années Série noire en 5 volumes (1992, 1993, 1994, 1995 et 2000, 38€ le volume – aujourd’hui épuisés, les prix s’envolent, ils mériteraient une réédition) délaissant les auteurs au profit de leurs œuvres qu’il résume en quelques lignes et commente, signalant ça et là quelques curiosités*, citations ainsi que les rééditions. Un index en fin d’ouvrage permet au lecteur, à la lectrice, de retrouver les thèmes, les personnages, les lieux, les traducteurs, les auteurs et les titres. Le volume 1 a reçu en 1992 le Trophée 813 Maurice Renault.

* Ainsi, le n°53 de la Série noire, attribué à John Amila, dont le titre était Y’a pas de bon dieu ! fut renommé par le journaliste du Populaire le 7 mai 1950 Il n’y a pas de bon dieu ! Ce qui est, vous en conviendrez plus correct et idiot.

Il aussi œuvré pour des anthologies comme celle publiée à L’Atlante avec Michel Lebrun : La Crème du crime (Anthologie de la nouvelle noire et policière française) où l’on trouve de petits bijoux (88 textes en deux volumes en 1995) comme la seule nouvelle de Jean Meckert alias John ou Jean Amila : L’écluse noire (p.341) ou un des rares textes courts de Georges Jean Arnaud le prolifique : Semaine sanglante (p. 368, tome 1). Un livre dont la dédicace, même avec une faute, m’emporte loin…

L’auteur discret

Il s’est aussi essayé à la fiction : jeunesse (Pas de peau pour Miss Amaryllis, 1987, Syros), poulpesque, avec le délicieux Cantique des cantines (Baleine, 1997) et a écrit quelques nouvelles comme Y’a pas photo ! (Terres de brume, 2007). Il a dirigé des collections au Mascaret, chez Autrement et a initié une collection originale, Double noir, dans laquelle il couplait un auteur classique et un auteur moderne, comme un trait d’union naturel propre à la grande famille du noir. Collection que je ne pouvais qu’encenser puisque j’avais moi-même créé La Loupiote la collection Zèbres qui couplait un auteur connu à un auteur inconnu inversant la classique première partie du concert afin d’attirer le chaland à l’achat (Lire à Z).

La postérité

Il aurait été fier (voire ébahi aussi selon sa femme Ida) de voir tous les hommages qu’on lui a rendus et notamment du Prix Claude Mesplède Quais du Polar du livre de non-fiction sur le polar, un prix récompensant « chaque année une œuvre participant à une meilleure connaissance du genre polar, sous la forme d’essai, d’ouvrage historique, de correspondance, de document, d’enquête, de traduction, d’édition originale d’œuvres complètes ou inédites, de traduction nouvelles ou encore de travaux académiques et universitaires. Les œuvres audiovisuelles seront également éligibles. » ainsi que du Prix Découverte Claude Mesplède remis récemment à Fabrice Tassel en 2023 pour On dirait des hommes à La Manufacture de livres, lire plus haut (et à Sylvia Cagninacci en 2022 pour Des îles et des chiens, IN8, à Caroline Hinault pour Solak en 2021 pour Solak, Le Rouergue). Sa femme, Ida, perpétue sa mémoire et organise le Festival Lisle noir.

Mais il n’aurait peut-être pas aimé ce ton hagiographique qui fait vite d’un pape mort un saint et qui sied peu à la famille du noir. Aussi vais-je redire ce que j’avais écrit à propos du créateur du DILIPO à la lettre D : « Abordable, il pouvait être agaçant tant son sérieux appliqué au genre tournait parfois à l’obsession et au ridicule quand il peinait à voir la lune cachée par son doigt ; je sais qu’il n’appréciait que moyennement nos facéties (ça prend, ça n’prend pas) chez Caïn, et que le site de Tutu reporter, l’opportuniste, le hérissait au plus haut poing, comme si ces gens-là n’œuvraient pas, eux aussi, pour cet « objet de passion » commun. » J’avais alors rajouté : « Mais il était comme ça le Claudeu, franc, entier, fallait pas toucher « au genre que nous aimons » et s’il fallait entonner une Marseillaise pour abreuver nos sillons, il n’était que rarement précédé par son/mon vieux compagnon du noir, son ami de Toulouse, Pascal Dessaint. Il faut l’avoir entendu meugler Le pinard, c’est de la vinasseu ! pour comprendre que l’homme était fidèle aux êtres de chair et de papier. Il ne faisait pas de différences entre les deux et était fier – comme un pape – d’être devenu, dans certains romans, un héros d’aventures noires sous la plume des plus grands de Dessaint à Lehane, » de Pouy à Ellroy.

Extrait d’Underworld USA de James Ellroy

Héros de papier, héraut dans la vie, Claude Mesplède aura brillé et porté haut la couleur. Si elle brille autant encore aujourd’hui, c’est un peu grâce à lui.

La Contribution de Pascal Dessaint

Claude et Pascal à Mauves en 2010

1992. Le hasard fait bien les choses. Je travaille à Radio Mon Païs, Ida aussi. Un jour, elle me dit : «Champagne, c’est mon anniversaire samedi, tu viens ?» Claude m’accueille avec son grand sourire et me lance, les initiés comprendront : «Ne t’inquiète pas, je n’ai pas de Bruce Springsteen à la maison…»

Ça fait 32 ans… À l’époque, il n’y a pas le foisonnement de festivals que l’on connaît aujourd’hui. Le polar français se retrouve à La Roche-sur-Yon, Bergerac, Saint-Nazaire… Claude me dit : «Tu viens…» J’entre ainsi dans la famille. Je rencontre les auteurs que j’admire : Jean-Bernard Pouy, Hugues Pagan, Michel Quint… Dès lors, c’est souvent sur les routes, toujours les blagues et les chansons… Fils d’Allemagne, suis ton chemin…

Et puis il y a l’été les journées du RPR. Je précise. Roman Policier Rigolo (Interdit d’être sinistre). Roman Policier Rural (Rural noir déjà). Rouge Plant Rosé ! Bien sûr, ça chante… Pierre-Alain Mesplède est de la bande. Et Fred Vargas. Et Bertrand Audusse. Et Poppy. Et tant d’autres ! Ça joue ! Ça quizze ! Ça parlotte ! Ça tangue !

1996. Nous sortons notre poulpe ensemble. L’occasion d’autres bourlingues, d’autres joies. Un cantique qui se termine dans les Pyrénées… Que d’étapes sur la route du Noir. Les tournées CCAS, héroïque en Roussillon, aléatoire en Corse. Et Cognac en 2006. Et Mexico en 2005. «Tu viens ?» Comme si j’avais le choix ! Et nous avons chanté encore, Luis Mariano, ça va de soi…

Comme beaucoup, je dois immensément à Claude. Demain, d’autres auteurs viendront, ils n’en seront peut-être pas conscients, mais ils devront aussi immensément à Claude.

Claude aura contribué, avec Jean-Patrick Manchette et Michel Lebrun, à ce que le Polar soit devenu un genre respectable.

Claude ouvrait les bras et c’était pour toujours…

Claude aimait les auteurs, ces drôles de bêtes…

Claude était sans préjugés…

Claude était toujours du côté du plus fragile, de l’ouvrier comme de l’auteur débutant…

Claude était générosité et joie…

Claude

Merci Pascal. Texte et illustration extrait du site de l’auteur.

À SUIVRE

François Braud

papier écrit en écoutant Christophe Miossec et son Brest of. Mireille pouvait pas ; elle était perdue dans un petit sentier qui sentrait la noisette…

erci à Vali Izquierdo pour ses lettrines…. qui, quand elle ne dessine pas, enfile des perles avec talent, voyez plutôt.

À venir le 1er avril :

étastade, Martyrs de la cité (Les) (Gatinet), Michalski (Freddy), Microfictions (Jauffrit), Mictlan (Rutes), Mikaël, Minuit (Les Éditions de) et Mizio (Francis)… sous réserves d’un mercato mouvementé, tourmenté et tumultueux…

C’est déjà du passé…

Lettre A, Partie 1 / Télécharger ? je clique là (ABC du métier (L’) / Alcool / Alibi)

Lettre A, partie 2 / Télécharger ? je clique ici (Amila Meckert / Arme du crime)

INVITÉ La contribution au CDAP : A comme Amila par Didier Daeninckx (auteur de romans noirs : Rions noir, avec Jordan, Creaphis)

Lettre A, partie 3 / Télécharger ? C’est là (Arnaud / Auster / Avis déchéanceAkkouche / Aztèques dansantsWestlake)

Lettre B, partie 1 / Télécharger ? C’est par là (Baronian / Bataille des Buttes-Chaumont (La)Jonquet / Battisti / Bête et la belle (La)Jonquet / Bialot / Bible)

INVITÉ La contribution au CDAP : B comme Battisti par Gérard Lecas (auteur de romans noirs : Deux balles, Jigal)

Lettre B, partie 2 / Télécharger ? Je clique là (Black BlocsMarpeau / Blogs / Brève histoire du roman noir (Une)Pouy / Brouillard au pont de BihacOppel / Bruen)

INVITÉ La contribution au CDAP de Jean-Bernard Pouy (auteur de En attendant Dogo), B comme Bruen.

Lettre C, partie 1 / Télécharger ? Je clique ici (Ça y est, j’ai craquéDessaint / Cadavres ne portent pas de costards (Les) – Reiner / Caïn / Canardo / Cette fille est dangereuseGranotier / Chuchoteur (Le)Carrisi / Chute)

Lettre C, partie 2 / Vous pouvez télécharger le post (Classer/déclasser, Codes et des poncifs, Condor (Le) Holmas, Michael Connelly)

Lettre C, partie 3 / À télécharger, (John Connolly, Contrat, Cosmix banditosWeisbecker, Coup du bandeau, Couverture (4ème de), Critique, Cuba, Cummins et BACK in ABC).

INVITÉ La contribution au CDAP : C comme Connolly par Pierre Faverolles (blogueur blacknovel1)

Lettre D, partie 1 / Téléchargez ? (Dahlia noir (Le)Ellroy, DamagesKessler, Kessler et Zelman, Del Árbol (Victor), Delestré (Stéfanie), Der des ders (Le) – Daeninckx et DexterLindsay/Manos Jr)

La contribution au CDAP : D comme Dahlia noir (Le)Ellroy – par François Guérif (éditeur Rivages, Gallmeister)

Lettre D, partie 2 / À télécharger, ici (Dicker Joël / Dictionnaire Amoureux du Polar (Le) de Pierre Lemaitre / DILIPO (Le) dirigé par Claude Mesplède / Divulgâcher, Donneur (Le) Akkouche / Doyle (Conan) / Drôles d’oiseaux Camus.

INVITÉ La contribution de Frédéric Prilleux au CDAP (auteur et spécialiste BD polar, blogueur bedepolar) : D comme Dredd (Le Juge)

Lettre E / Cliquez pour télécharger (Edogawa Ranpo, Encrage, É(L’) ou le polar lecture facile et Excipit (et incipit)).

IINVITÉ La Contribution d’Éric Libiot (journaliste écrivain – Clint et moi, On a les héros qu’on mérite) au CDAP avec le E de La Disparition de Perec et Echenoz.

Lettre F / Téléchargez le post (Fanzine, Fausse piste de Crumley, Faux roman policierGrand maitre de Harrison, Festivals, Fight Club de Palahniuk).

Lettre G, partie 1 / Cliquez pour le téléchargement (Gang de la clé à molette (Le) d’Abbey, Gendron, Goodis).

IINVITÉ La Contribution de Philippe Claudel (auteur : Les âmes grises, Le Rapport de Brodeck, Crépuscule, pour Edward Abbey).

Lettre G, partie 2 / Téléchargez ici ((Le) Grand monde de Pierre Lemaitre, (Le) Grand soir de Gwenaël Bulteau, (Le) Grand sommeil de Raymond Chandler et le film d’Howard Hawks et Jean-Christophe Grand G (Grangé)).

INVITÉ La Contribution au CDAP de Hélène Martineau, libraire des Instants Libres au Poiré sur vie (Le Grand monde de Pierre Lemaitre)

Lettre G, partie 3 / Le téléchargement, c’est (Gravesend de Boyle, Jean-Paul Guéry et son 5/5La Tête en Noir, Gunther – héros de Philip Kerr, Jeanne Guyon et son 5/5Rivages).

INVITÉ La Contribution au CDAP de Stéphanie Benson, auteure (collection Tip Tongue) pour Bernie Gunther de Philip Kerr.

Lettre H, partie 1 / Cliquez ici pour le téléchargement (Haine pour haine (Eva Dolan)Happy ValleyHardy Cliff (Peter Corris), Hannibal et Harris ThomasHole Harry (Jo Nesbo) et Himes Chester (Harlem).

INVITÉ La Contribution au CDAP de Thierrry Maricourt, auteur (Hautes conspirations, La Déviation), spécialiste des littératures nordiques pour Jo Nesbo.

Lettre H, partie 2 / Télécharger la lettre : Hinkson Jake, Homme qui marchait sur la lune (L’) / Howard McCord, Homos privés & flics, Huit cent treize – avec un 5/5 de Corinne Naidet et Humour.

INVITÉ La Contribution au CDAP de Francis Mizio, auteur (Au lourd délire des lianes) pour « Polar humoristique : ce devrait être quoi le job ? »

Lettre I, partie 1 / On clique ici pour télécharger la lettre : I got my mogette working de JB Pouy, Ikigami de Motorô Mase, In8 – avec un 5/5 de Josée Guellil, Ippon de Jean-Hugues Oppel et Iran.

INVITÉ La Contribution de Jean-Hugues Oppel pour I comme Ippon.

Lettre I, partie 2 / Cliquez pour télécharger la lettre : Irlande, Isard, Islande, Italie et Izzo.

INVITÉS Les Contributions au CDAP de Gérard Lecas pour Italie 1 (Scerbanenco), Italie 2 (Pinketts) et Italie 3 (Viola) et d’Hervé Jaouen pour Irlande (O’Flaherty).

Lettre J, partie 1 / Téléchargez le tome 20 du CDAP : J’attraperai ta mort, J’étais Dora Suarez (Robin Cook), Jaenada (Philippe), Jamet (Jacques), Jaouen (Hervé), Je mourrai pas gibier (Guillaume Guéraud), Je vais mourir cette nuit (Fernando Marias), Jeunesse – avec un 5/5 de Clémentine Thiébault – et Jesus vidéo (Andreas Eschbach).

INVITÉ Hervé Commère (auteur de Les Intrépides)- et sa Contribution pour J comme la publication de J’attraperai ta mort.

Lettre J, partie 2 / Cliquez ici pour télécharger le tome 21 du CDAP : JiBé Pouy et Jour de l’Urubu (Le), JJR, Johnson (Robert, pas Craig ni Jack Johnson chantant Taylor, ni le Jack Taylor de Bruen), Jones (Graham), Joy (David), Justice (avec Engrenages) et Justified (série).

INVITÉ La Contribution d’Isabelle Jensen (bibliothécaire et ex-compagne de JJR) en hommage à Jean-Jacques Reboux

Lettre K / On télécharge par le tome 22 (les Vl’à !) du CDAP : Karl Kane (le privé de Millar), Khadra Yasmina, King Stephen (Billy Summers), Krajewski Marek, Krimi (le polar allemand avec un 5/5 de Karole de Benedetti) et Kutscher Volker (et Babylon Berlin) et Kristy Éric.

Lettre L, partie 1 / Je télécharge le fichier , c’est le tome 23 du CDAP : L‘Un seul (Olivier Thiébaut), Lacy (Ed), avec Roger Martin, Lamar (Jake), Larcenet (Manu), Lebrun (Michel) (pape du polar) avec un 5/5 avec Éric Libiot et Lecas (Gérard).

INVITÉ La Contribution de Paul Maugendre (critique) sur L’Enfant de coeur

Lettre L, partie 2 / On télécharge ici ce tome 24 du CDAP, avec au menu : Lemaitre et La Contribution d’Olivier Thiébaut, Levison, Leroy et Les Derniers jours des fauves, Les Lieux sombres de Flynn, Leydier, Libraires, librairies, Lire et livres et un 5/5 d’lène Martineau et les Éditions de la Loupiote.

INVITÉ La Contribution d’Olivier Thiébaut (auteur, voir CDAP, lettre L) pour évoquer Pierre Lemaitre.

Lettre M (Partie 1) / Cliquez ici pour télécharger le tome 25 du CDAP : M le maudit (Lang) et la contribution de François Guérif (M de Losey), McDaniel (Tiffany) et un 5/5 avec Olivia Castillon, McGuffin, Maffieuses (Les) (Dietrich), Malaussène et Malet (Léo).

INVITÉ La Contribution de François Guérif (éditeur) pour M de Losey

erci de me suivre…